Alors que les séquelles de la pandémie du Covid-19 tendent à diminuer, la place de la nouvelle technologie pour révolutionner le secteur médical au Rwanda se dessine. Le gouvernement et les professionnels de la santé en attestent par la diminution considérable des cas du paludisme grâce à ces start-up en matière de la santé. Ils ont aussi comblé le gap laissé par le nombre insuffisant de médecins docteurs par rapport à la population qui se rend au dispensaire. Plusieurs patients affirment avoir été servis et guéris alors que consultés à distance notamment par téléphone.
Nyirahabimana Solange, 55 ans, paysane, habite le district de Bugesera situé dans la province de l’Est qui présente le pic des cas du paludisme au Rwanda.
En 2021, elle et trois membres de sa famille ont atteint et guéri le paludisme grâce aux consultations à distance.
« Je n’ai fait qu’un simple appel à un numéro vert, gratuit. J’ai été reçu par un docteur généraliste. Je lui ai expliqué des signes diagnostiques, en désordre. Et du coup, il m’a fait une prescription médicale dans un message codé que j’ai présenté au dispensaire le plus proche de moi. J’ai alors eu une cure de traitement contre la malaria. Au bout d’une semaine, j’étais guérie », explique-t-elle, ajoutant qu’il a été de même pour son mari et ses deux filles.
C’est aussi la même expérience vécue par Joseph et Marthe, deux rwandais, rencontrés au centre de négoce de Nyamata, un centre urbain du district de Bugesera.
« Ce qui nous a agréablement surpris, c’est que nous avons été consultés à distance, par téléphone, sans faire une queue au centre de santé ni payer des frais de consultation», font-ils remarquer.
« Babyl », une révolution sanitaire.
Les appels faits par Solange, Joseph, Marthe…ont été aussi faits par plus de 2.900.000 personnes, citoyens rwandais ou étrangers résidant au Rwanda dans les 6 dernières années.
Un numéro vert gratuit a été mis en place par ce système. Il est accessible à tout le monde, citoyens et étrangers résidant au Rwanda.
D’origine britannique et lancée en 2013, cette application mobile de consultation médicale permet de mieux orienter les patients grâce à un start-up qui fait le pont entre un malade et un médecin.
« Nous sommes réunis dans une salle à Kigali. Nous sommes entre 15 et 20 docteurs et chacun est dans son coin considéré comme une chambre de consultation. Je reçois un appel tous les sept minutes et peux facilement consulter plus de 60 patients dans les 8 heures de mon shift par jour », explique un docteur généraliste, qui travaille 4 fois la semaine dans cette nouvelle salle de consultation technologique qui a révolutionné le secteur de la santé.
Ces médecins docteurs sont choisis suivant leur performance. Un appel d’offre a été lancé par les propriétaires privés de « Babyl Rwanda » et seuls ceux qui ont réussi à l’examen ont été sélectionné.
« Je consulte principalement le paludisme, les maladies sexuelles, la grippe, les maux de têtes, les maladies des femmes, les Allergies, les Démangeaisons anales, l’Asthme, les Problèmes d’allaitement, la douleur chronique, les Rhumes, … bref les maladies qui ne nécessitent pas obligatoirement la présence physique du patient », renchérit le docteur.
En 2016, le gouvernement du Rwanda et « Babylon Health » (opérant sous le nom de Babyl au Rwanda) ont conclu un partenariat de 10 ans pour permettre aux Rwandais de tout le pays d’accéder à des services de santé de qualité via leurs téléphones portables.
Grâce à ce partenariat, « Babyl » s’est engagé à travailler avec le ministère de la Santé pour développer un nouveau modèle de prestation de soins de santé appelé “Digital-First Integrated Care”, pour un accès pratique à des médecins et infirmières qualifiés, en particulier pour les personnes vivant dans des zones reculées.
L’Agence de Développement du Rwanda, (RDB) salue cet apport.
« L’investissement de Babyl au Rwanda contribue à la stratégie nationale de transformation du Rwanda, en garantissant en particulier l’accès à des soins de santé de qualité pour tous et en faisant du Rwanda une économie basée sur la connaissance compétitive à l’échelle mondiale grâce à de tels partenariats qui renforcent les compétences avec des applications numériques pratiques dans le domaine de la santé », analyse faite par madame Clare Akamanzi, directrice générale de RDB.
Cette agence a promu de bien coopérer avec ce nouveau système notamment en lui garantissant des facilités administratives et légales ou encore dans la sensibilisation de la population pour adhérer à ce système de soins de santé.
Le système traite plus de 40 maladies dont la Douleur abdominale, les Allergies, les Démangeaisons anales, l’Asthme, les Problèmes d’allaitement, la douleur chronique, les Rhume, la grippe et infections des voies respiratoires, le Constipation, Conseils contraceptifs, Maladies diarrhéiques (symptômes légers), Intoxication alimentaire et bien d’autres.
Quid de son opérationnalisation.
Un patient, aidé par des agents de « Babyl » installés dans presque tous les hôpitaux de districts et centre de santé, s’inscrit sur la plateforme. Il pourra alors prendre un rendez-vous. Un infirmier les rappellera ensuite et les guidera vers un docteur du jour.
« Si je trouve qu’il a besoin de faire un examen quelconque, je lui donne un message qu’il présente aux agents du système à l’établissement médical qui lui est proche. Ce dernier réalise des examens et met les résultats dans la banque de données qui m’est accessible et alors je lui prescrits des médicaments à partir des résultats des tests faits », note le docteur du système « Babyl » qui souligne que « les ordonnances seront également délivrées par SMS pour que les patients puissent acheter des médicaments dans les pharmacies et à travers des assurances et la mutuelle de santé ».
La RSSB, agence nationale de sécurité sociale salue ce qu’elle qualifie de partenariat vital.
« Les soins de santé numériques sont une étape importante pour garantir que tous nos membres puissent facilement accéder à des médecins sans craindre de perdre leurs revenus ou de se soucier de se rendre dans un établissement médical. Une intervention précoce avec un accès facilité aux soins de santé réduira également la charge pesant sur notre système de santé universel », a fait savoir un officiel RSSB.
Plus jamais l’automédication.
Commentant sur les technologies dans le secteur de la santé, insistant sur le partenariat avec « Babyl », le ministère de la santé y voit un gain multidimensionnel.
« Nous sommes ravis d’avoir un partenariat avec ‘Babyl’ qui travaille aux côtés de tous nos établissements de santé et la mutuelle de la santé pour fournir ce service de santé numérique innovant. Cela aidera à arrêter l’auto-diagnostique et l’auto-médication qui entraînent des complications à plus long terme ou encore des décès. Avec la réduction de la charge pesant sur les centres de santé et autres établissements médicaux, nos professionnels de la santé consacreront désormais plus de temps et de ressources aux cas médicaux graves, ce qui augmentera encore la qualité de la prestation des soins de santé à travers le pays», a déclaré le ministre de la santé, Dr Daniel Ngamije.
Revers de la Medaille
Même si louée, cette technologie a ses défis.
« En fait, on aurait aimé faire un suivi régulier des malades, ce qui n’est peut-être pas facile. Et puis, il peut arriver qu’en patient éprouve du mal à s’exprimer et à expliquer les signes de sa maladie alors qu’une bonne consultation suppose la lecture de la communication gestuelle, voir comment des signes se présentent, les toucher et les observer de près. Cela en fait limite l’efficacité de ce système même si à vrai dire ce start-up a sensiblement et considérablement révolutionné notre monde médical », laissent entendre des docteurs et infirmiers du système « Babyl ».
Ils suggèrent qu’il y ait d’autres recherches et des technologies qui se complètent car, estiment-ils, « une chaine de start-up peut encore plus faire mieux ».
Le système fonctionne 16heures par jour, de 7h du matin à 22h de la soirée, réparties dans deux shift de 8heures, 7 jours sur 7.
« Des cas d’urgences peuvent se déclarer même à une heure du matin hors de nos services, ce qui veut dire qu’il y a un gap toujours à combler dans l’avenir », souligne une infirmière de « Babyl ».
Ce constat est aussi fait par Aline, une femme qui a appelé dans la nuit au système Babyl pendant la nuit sans être reçu.
« Mon enfant souffrait de la diarrhée. Je pensais qu’ils allaient me prescrire des médicaments pour aller les acheter dans une pharmacie tout de moi, mais le téléphone n’a pas été reçu. Je demande qu’ils augmentent les heures de services », dit-elle.
Et Dr Shivon Byamukama, la directrice générale de « Babyl Rwanda » de rassurer que les améliorations pourront être opérées pour mieux sauver des vies humaines et offrir des soins de santé de qualité.
La plateforme a été donnée et implantée au Rwanda gratuitement pour perturber les soins de santé traditionnels et apporter une plus-value.
D’après le classement « Doing Business »,édition 2021, le Rwanda est classé parmi les premiers pays qui innovent en matière de la technologie.
« L’innovation technologique est omniprésente. On la retrouve notamment dans des secteurs comme la santé (e-cliniques, livraison de médicaments par drone), les services municipaux (informatisés et accessibles en ligne, ce qui contraste avec la forte bureaucratie rencontrée dans les autres pays de la région) ou encore l’accès aux services financiers », note le rapport.
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